Patrice Donot a travaillé dans une PME au contact de l’amiante sans être ni informé ni protégé par son employeur. Quand il a découvert le pot-aux-roses il n’a pas accepté que ses collègues et lui aient été mis en danger : il a exercé son droit de retrait, médiatisé l’affaire et décidé de créer une association sur le département.
« L’amiante, ce n’est pas dangereux...
quand c’est les autres qui la respirent ! »
« Je travaillais dans une entreprise de 26 salariés, sous-traitante d’un bailleur social, explique Patrice. Quand un locataire quittait son logement, nous devions le remettre en état avant qu’il ne soit réoccupé. Il fallait changer les dalles de sol, le carrelage, refaire la salle de bain, percer les dalles... »
Beaucoup de ces opérations auraient du normalement relever de
la « sous-section 4 » du décret du 4 mai 2012
qui régit les interventions sur des matériaux ou équipements susceptibles de provoquer l’émission de fibres d’amiante.
Mais ni Patrice ni ses collègues ne le savaient.
« C’est par hasard que j’ai découvert le pot aux roses, explique-t-il. En décembre 2015, sur mon chantier, deux collègues sont venus percer la dalle béton en présence d’amiante. La machine envoyait de l’eau. Ils portaient une combinaison et un masque. Eux étaient protégés et moi, j’ai travaillé sur le même chantier sans aucune protection ! J’ai commencé à me poser des questions... »
Patrice écrit alors à son employeur des lettres qui restent sans réponse.
Il cherche à se documenter sur l’amiante et la réglementation, et fait un coup d’éclat : « En février dernier, j’ai vu sous du carrelage, une matière fibreuse qui ressemblait à du goudron. J’ai soupçonné la présence d’amiante et j’ai exercé mon droit de retrait. »
L’omerta est brisée. Les choses se mettent à bouger. Il contacte l’inspection du travail. En mars, l’OPPBTP tient une réunion d’information avec les salariés qui confirme le risque de l’amiante. Le 23 mars, la direction sort une note de service informant les salariés qu’ils ne doivent plus percer, casser, déposer ces matériaux, en application du principe de précaution. Une première formation au risque amiante est prévue pour le 2 mai.
« On nous a mis en danger sans nous le dire. Je ne peux pas l’accepter », explique Patrice.
Pour continuer cette bataille il a besoin d’un outil : « J’ai d’abord pensé créer un collectif. J’ai cherché des informations et des appuis. J’ai vu qu’existait une association départementale de victimes de l’amiante dans les Ardennes et qu’il n’y en avait pas dans la Marne. J’ai pris contact avec l’Andeva nationale pour voir comment on pouvait en créer une. »
Après divers échanges par mail et au téléphone, la décision est prise de constituer l’ALDRA 51 (association locale de défense contre le risque amiante dans la Marne). Ses statuts sont déposés et enregistrés en préfecture. Un article annonçant la création de l’association parait dans le journal local. Il fait tilt. Une réunion se tient à la mi-avril avec Hélène Boulot, Patrice Raveneau et Didier Faure.
« Nous ne sommes pas les seuls à connaître cette situation, constate Patrice. Il y a 600.000 habitants dans la Marne. A Reims, 43% des logements sont des logements sociaux. C’est pourquoi nous avons ressenti le besoin d’élargir notre action au département de la Marne.
Notre motivation première a été et reste la prévention. Mais nous voulons aussi aider des victimes et des familles à obtenir réparation de leurs préjudices... »