« Nous sommes régulièrement alertés sur la présence d’amiante dans des établissements scolaires, explique Henri Boumandil, secrétaire de l’Addeva 93. C’est ce qui s’est passé à Aubervilliers, Noisy-leSec, l’Haÿ-les-Roses. Nous participons à des réunions avec des parents d’élèves, l’administration, la municipalité et des personnes qui se présentent - parfois à tort - comme des experts ».
Déni du risque ou principe de précaution ?
En présence d’amiante, la première réaction des autorités devrait être d’informer en toute transparence et d’appliquer le principe de précaution.
C’est ce qu’ont fait spontanément certains maires en prenant des mesures conservatoires immédiates, telles que la fermeture de classes avec déplacement des élèves, la communication du « dossier technique amiante » et l’organisation d’une réunion d’information.
Cela dit, la première réaction est trop souvent la frilosité, voire le déni : sous prétexte de « ne pas affoler et d’éviter la psychose », on pense davantage à rassurer qu’à protéger. On se fie aux résultats douteux de mesures d’empoussièrement qui ne sont pas représentatives, pour claironner qu’il n’y a « aucun risque ».
Et c’est seulement quand les personnes concernées commencent à se mobiliser et quand la presse s’en mêle que les mesures nécessaires finissent par être prises.
Sept années pour être entendus
Ces problèmes ne datent pas d’hier. En 1999, en Loire Atlantique, des parents d’élèves soutenus par l’Addeva 44 avaient demandé à la mairie de la Baule de retirer des dalles de sol amiantées dans les écoles primaires et maternelles.
Il a fallu sept années de lutte pour obtenir le retrait des dalles : d’innombrables démarches auprès de la mairie, de la préfecture et de la DDASS, des articles de presse. Henri Pézerat avait fait une contre-expertise démolissant les résultats faussement rassurants de mesures d’empoussièrement non représentatives, faites un mercredi en l’absence d’activités susceptibles de mettre en suspension des fibres d’amiante dans l’air. Sept années au cours desquelles, des enfants ont été mis en danger.
Ainsi, en 2004, des dalles en vinyle-amiante avaient été enlevées sans précaution dans une salle de classe, certaines découpées à la meuleuse-disqueuse, puis laissées sur place dans des salles réoccupées les jours suivants par des enfants.
Les employés communaux ignoraient la présence d’amiante...
Deux écoles et un gymnase
« L’école maternelle Paul Bert à Sens a brûlé il y a 3 ans, raconte Patrick Thourigny, président de l’Addeva Yonne. Les élèves ont été relogés dans l’école des Champs d’Aloup. Nous avons appris qu’il y avait de l’amiante dans ces deux écoles et dans un gymnase.
L’Addeva a contacté un collectif de parents qui a écrit à la mairie et à la protection maternelle infantile (PMI) pour dire leur inquiétude pour la santé des enfants. La nouvelle école est dans un état lamentable (trou dans le tolt, dalles de sol arrachées...). Ils ont demandé le dossier technique amiante (DTA) et des analyses de matériaux.
J’ai écrit à la mairie pour demander le DTA de toutes les écoles de Sens construites avant l’interdiction. Je n’ai pas encore de réponse écrite, mais j’ai été informé oralement qu’’une mise à jour des DTA de toutes les écoles allait être faite. »
Des actions en justice peuvent être efficaces
Quand il n’est pas possible de régler de telles situations par le dialogue, une plainte pour mise en danger d’autrui peut être déposée.
La jurisprudence est favorable (voir page 24). Les associations peuvent se porter partie civile.
Savoir où est l’amiante et dans quel état
La loi impose au propriétaire de communiquer le DTA aux occupants et aux intervenants. En pratique ceux qui demandent à voir le DTA se heurtent souvent à des réticences, voire à des refus.
D’où l’intérêt de la proposition faite par le Pr Claude Got en 1998 : la mise en ligne sur Internet du contenu des DTA par bâtiment avec libre accès à ces données.
Cette proposition permettrait aux parents, enseignants, agents d’entretien et intervenants extérieurs de vérifier où il y a de l’amiante et dans quel état.
Un plan pluri-annuel pour éradiquer l’amiante
Il y a aujourd’hui en France 20 millions de tonnes d’amiante en place. On ne résoudra pas un problème d’une telle ampleur au cas par cas. L’éradication de cet amiante doit être une priorité nationale. L’Andeva demande l’élaboration d’un plan pluri-annuel, décliné par région et par ville, en commençant par les bâtiments recevant du public, et particulièrement les écoles.
Les enfants sont plus vulnérables que les adultes, parce que leurs défenses immunitaires sont plus faibles et que leurs voies respiratoires sont plus près du sol. Le désamiantage des locaux scolaires doit être la priorité des priorités.