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Vincennes, 16 juillet 2019

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amiante

23 ans d’instruction pour un non-lieu général dans le dossier Eternit

 

Les magistrats du pôle judiciaire de santé publique ont rendu le 11 juillet une ordonnance de non-lieu dans le dossier pénal emblématique des usines d’amiante-ciment Eternit. Cette décision est un déni de justice. L’Andeva et les associations locales concernées ont interjeté appel.

Le 11 juillet restera dans les mémoires des victimes des usines Eternit de Thiant, Paray le Monial, Albi, Renne Saint-Grégoire, Caronte-Martigues, Triel-sur-Seine. C’est la date à laquelle les magistrats du pôle judiciaire de Santé publique ont rendu un non-lieu qui absout les responsables de ces établissements. Les familles vivent cette décision comme une insulte à la mémoire du mari, du père, du fils ou de l’épouse qui ont été tués par ce matériau dont les effets mortels étaient connus de longue date..

23 ans d’instruction pour en arriver là !

En mai-juin 2017, les juges d’instruction avaient déjà annoncé qu’ils cessaient toute investigation parce que la responsabilité des maladies et des décès ne pouvait « être imputée à quiconque ».  Il leur a fallu deux ans pour rédiger ce non-lieu ! Les victimes et les juges n’ont sans doute pas la même notion du temps...

Les magistrats motivent leur décision par « l’impossibilité de dater l’intoxication des plaignants » par l’amiante, ce qui – selon eux - empêcherait d’établir un lien de causalité certain entre les fautes présumées et le dommage (maladie ou décès).

Cet argument repose sur une interprétation grossièrement erronée du rapport d’expertise Lasfargues, Similowski et Pralong. Les connaissances scientifiques sur les mécanismes d’action de l’amiante dans l’organisme, le démontrent. L’amiante est un cancérogène sans seuil d’innocuité dont les effets toxiques sont à l’œuvre dès les premières expositions. Ces effets ne résultent pas d’un événement ponctuel, mais d’un processus d’accumulation des fibres inhalées tout au long de la période d’exposition. C’est cette période qui doit être prise en compte.

La responsabilité pénale ne requiert pas l’existence d’une date précise d’intoxication ni pour caractériser le lien de causalité, ni pour imputer l’infraction à une personne déterminée.

 

Le second argument pour motiver ce non-lieu est « l’absence de démonstration d’une faute pénale » imputable à la société Eternit et à ses dirigeants. L’ordonnance leur décerne un véritable certificat de bonne conduite pour avoir mené une « politique Amiante-Santé » considérée comme une « priorité stratégique », osant même affirmer que « toutes les dispositions ont été prises en vue de réduire l’empoussièrement des sites au minimum ».

Les magistrats ont volontairement ignoré les innombrables témoignages des salariés qui suffoquaient dans ces ateliers saturés de poussières d’amiante, alors que dès avant 1977, la réglementation imposait des systèmes d’aspiration dans les locaux de travail et des protections individuelles.... Ils ont ignoré les multiples condamnations pour « faute inexcusable de l’employeur ». Ils ont préféré présenter des délinquants industriels comme des prix de vertu.  Une telle partialité les disqualifie.

 

La « politique Amiante-Santé » d’Eternit ? Parlons-en ! Dans la société Eternit, les morts de l’amiante se comptent par centaines. À l’usine de Vitry-en-Charollais, le Caper Bourgogne compte officiellement à ce jour 147 décès dus à des maladies de l’amiante. Un chiffre sans doute bien inférieur à la réalité. Et la liste n’est malheureusement pas close. Cinq anciens salariés d’Eternit Caronte ont vu leur épouse tomber malade de l’amiante, parce qu’elle lavait leurs bleus travail que l’entreprise refusait de nettoyer.

 

L’Andeva et les associations régionales concernées par les dossiers Eternit ont fait immédiatement appel de cette ordonnance. Ce crime industriel ne doit pas rester impuni.

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