L’usine d’amiante de Canari sera déconstruite en 2025

Au Nord de la Corse, près du village de Canari une grande mine d’amiante a été exploitée par Eternit de 1920 à 1965. L’Etat a annoncé que cette friche industrielle serait déconstruite en 2025, 60 ans après sa fermeture. Un chantier complexe, dont la sécurité sera difficile à assurer. Ces travaux auront des répercussions sur la vie quotidienne des habitants des villages voisins.

L’usine est accrochée à une falaise abrupte, juste au bord de la route côtière.  L’amiante était extrait des roches amiantifères, mis dans des sacs en toile de jute et acheminé par bateau jusqu’au continent. 

28 000 tonnes par an

Le site a connu une période de prospérité au lendemain de la guerre.  300 familles de Français, d’Italiens et de Polonais sont venues s’installer à Canari.

L’usine produisait 28 000 tonnes de minerai par an. La France était alors le septième producteur mondial d’amiante. Mais cette activité a causé la mort de nombreux ouvriers et riverains.Elle a aussi pollué l’environnement. Les déchets de production rejetés pendant près d’un demi-siècle dans la mer ont formé, en contrebas de la falaise, la « plage noire » de Nonza, une plage artificielle de galets amiantés.

Un chantier à hauts risques

La déconstruction de l’usine sera pilotée par l’Ademe (Agence de la transition écologique). Ce chantier hors normes cumulera tous les risques : des constructions délabrées risquant de s’effondrer sur les voitures empruntant la route côtière, des bâtiments de grande hauteur, de très fortes pentes et... de l’amiante partout !

Il sera difficile d’éviter une fermeture temporaire de la route côtière qui compliquera la vie des riverains.

Le maire de Canari souhaite faire de cet emplacement un lieu de mémoire pour les générations futures. Mais répondant à un journaliste d’Aujourd’hui en France il explique : « il y a beaucoup de centenaires à Canari. Vous savez, ça prouve qu’il n’y a pas d’impact sur la santé de la population. »

Les disparus tués par l’amiante ne sont plus là pour le contredire.

 


STOCAMINE  : Le droit des générations futures

Le 28 septembre 2023, le préfet, mandaté par le gouvernement, avait pris une ordonnance autorisant un confinement définitif du stockage de 42 000 tonnes de déchets très toxiques (arsenic, amiante, chrome, résidus d’incinération…) sur le site des anciennes mines de potasse d’Alsace à Wittelsheim, dans le Haut-Rhin.

Dans un article du Monde, Stéphane Mandard rappelle que cette décision de confinement illimité s’est heurtée à l’opposition de nombreux élus locaux et d’associations de défense de l’environnement qui réclament « un déstockage au moins partiel » pour protéger  « la nappe phréatique d’Alsace, la plus grande d’Europe, qui alimente en eau potable sept millions de personnes de part et d’autre du Rhin ».

L’association Alsace nature a déposé un référé. Le 7 novembre, le tribunal administratif  de Strasbourg a rendu une ordonnance qui suspend cette décision, dans l’attente d’un jugement sur le fond d’ici quelques mois.

Le tribunal estime qu’il y a « un doute sérieux » sur la légalité de la décision de confinement illimité qui méconnaît l’article 1 de la Charte de l’environnement. Il considère qu’elle n’apporte pas garanties quant au respect du principe de réversibilité, protecteur des générations futures.

François Zind, avocat de l’association Alsace Nature, a salué ce jugement : « C’est la première fois qu’une décision de l’autorité publique est sanctionnée en raison de la méconnaissance du droit des générations futures. »

Stéphane Mandard souligne que ce droit des générations futures commence à être invoqué dans les contentieux climatiques », évoquant « une décision historique rendue en 2021, par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, en Allemagne » qui obligea Berlin à revoir à la hausse ses objectifs pour freiner le réchauffement.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°72 (janvier 2024)