L’O.M.I. INTERDIT L’AMIANTE DANS LES BATEAUX
C’est une décision importante, mais il reste encore à tirer toutes les leçons de l’affaire du Clémenceau.
L’Organisation Maritime Internationale (OMI) a publié le 3 décembre 2010 une circulaire interdisant l’amiante dans les bateaux des états membres.
Cette décision ne résout pas tous les problèmes liés à l’amiante en place sur les bateaux existants. Elle interdit du moins de mettre de l’amiante pour la construction ou la restructuration d’un bateau.
A ce jour, 169 pays sont membres de l’OMI, avec parmi eux tous les principaux producteurs (Russie, Chine, Brésil, Kazakhstan, Canada) et tous les plus gros consommateurs d’amiante (Inde, Indonésie, Philippines, Thailande).
Les problèmes de la protection des travailleurs face à l’amiante en place dans les bateaux et du sort des navires en fin de vie restent entiers.
Toutes les leçons de l’épisode du Clemenceau n’ont pas encore été tirées au niveau international.
La Convention de Hong-Kong proposée par l’OMI pour la sécurité et le respect de l’environnement dans le recyclage des bateaux n’a encore été ratifiée à ce jour que par quelques pays, dont la France, l’Italie, les Pays-Bas, Saint Kitts-et-Nevis et la Turquie.
SUISSE
Quand la prescription sert à blanchir les patrons
Le 28 janvier 2011, le tribunal fédéral de Lausanne a
débouté les deux filles d’un ancien salarié d’Alstom
(ex-Oerlikon) mort d’un cancer de l’amiante.
Le père des deux plaignantes avait été exposé à l’amiante de 1966 à 1978 chez Oerlikon. Son cancer avait été diagnostiqué en 2004. Il devait en mourir l’année suivante. Il avait engagé de son vivant un procès contre son ancien patron. Ses filles avaient continué la procédure.
En Suisse, le délai de prescription pour cette procédure est de dix ans. Or le temps de latence entre l’exposition à l’amiante et l’apparition de la maladie peut atteindre plusieurs dizaines d’années. C’est pourquoi leur avocat avait demandé que ce délai commence à courir à la date du constat de la maladie et non à celle de l’exposition à l’amiante.
Une position de bon sens que le tribunal fédéral n’a malheureusement pas suivie : il a jugé que le dossier était prescrit, privant ainsi la famille de la victime de toute réparation de ses préjudices.
Avec ce raisonnement les empoisonneurs peuvent dormir tranquilles : quand leurs salariés apprendront qu’ils ont un cancer professionnel, ils auront déjà perdu le droit d’aller en justice !
Maître Husmann, avocat des filles de la victime, entend porter l’affaire devant la Cour européenne des Droits de l’Homme.
Porte-parole à l’Office fédéral de la justice, Folco Galli a indiqué qu’un projet de révision est en cours afin d’allonger les délais de prescription dans les cas où l’atteinte dommageable ne se produit qu’après une longue période de latence.
THAÏLANDE
L’Assemblée nationale de santé demande l’interdiction
Fin 2010, une résolution de l’assemblée Nationale de la Santé note que « les données scientifiques ont montré que tous les types d’amiante étaient nocifs pour la santé, non seulement pour les travailleurs des usines de transformation, mais aussi pour les utilisateurs des matériaux ». Soulignant que 57 pays l’ont interdit, elle demande que le Ministère de l’Industrie « interdise ce matériau d’ici 2011, que ce soit pour l’importation ou l’exportation, pour la possession ou la fabrication. Les règlements de la construction doivent interdire l’amiante et des mesures pour l’élimination doivent être mises en œuvre. »
En Thaïlande, pays gros consommateur d’amiante, le Conseil économique et social et le Collège national de protection du consommateur ont également demandé l’interdiction.
ALGERIE
La colère des anciens travailleurs de l’amiante
Quand l’usine d’amiante de Meftah a fermé en 2009, ses salariés ont subi la double peine : perdre leur emploi et partir avec de l’amiante dans leurs poumons. Deux ans après, en février 2011, ils ont fait un sit-in devant le siège de leur société. « Nous sommes 360 salariés au chômage. Ils nous ont forcés au départ collectif, contre une indemnité dérisoire. Nous n’arrivons plus à nourrir nos familles. Nous demandons notre réintégration dans la société », a déclaré leur délégué.
EUROPE
Le Royaume Uni rappelé à l’ordre
La Commission européenne a adressé un "avis motivé" au gouvernement britannique pour n’avoir pas bien transposé la directive européenne sur la protection des travailleurs contre l’amiante. Elle lui reproche d’avoir étendu abusivement certaines dérogations pour des activités de maintenance (notamment sur le suivi médical et la tenue d’un registre des expositions). Le Royaume-Uni a deux mois pour se conformer aux exigences européennes, sinon la Cour européenne de justice pourrait être saisie.
Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°35 (avril 2011)