POUR LA PREMIERE FOIS AU BRESIL :
Le tribunal du travail de São Paulo condamne lourdement la société Eternit

La cour a infligé une forte amende de
500 000 euros à Eternit pour avoir «   oublié   » de signaler des maladies et des décès d’origine professionnelle au ministère. Dans une autre affaire le tribunal suit les réquisitions du Ministère public qui demandait le paiement des soins à vie à des ouvriers contaminés par l’amiante et l’indemnisation du préjudice moral de victimes et de familles de victimes décédées pour un total qui pourrait atteindre plusieurs centaines de millions d’euros. Des avancées obtenues par le combat mené depuis 17 ans par l’Abrea, l’association des victimes brésiliennes de l’amiante.

Au lendemain du procès de Turin, Eternit Brésil a réaffirmé sans broncher que «   l’utilisation de produits en fibro-ciment, de citernes, toitures avec de l’amiante chrysotile ne présente pas de risques pour la santé de la population   ». Comme si les poumons brésiliens étaient plus résistants que les poumons italiens...
Mais, sous l’onde de choc du jugement de Turin, l’étau de la justice brésilienne commence à se resserrer autour de cette société qui - pendant des décennies - a extrait, fabriqué et vendu en toute impunité ce matériau mortifère en dissimulant sa dangerosité.

Empoisonneurs, menteurs, tricheurs

Eternit avait caché au ministère des maladies professionnelle et des décès dus à l’amiante, y compris lorsque le tribunal du travail avait reconnu la faute de l’employeur et accordé des indemnisations à des victimes ou des ayants droit.
Or, au Brésil, l’employeur a obligation de «   déclarer et communiquer les accidents et maladies professionnelles (suspectées ou diagnostiquées) reliés à une exposition à l’amiante. »
Le ministère public a requis et obtenu une amende d’environ 500.000 euros.

Condamné à payer les soins et le préjudice moral

Dans une autre affaire, le tribunal du travail de São Paolo a reconnu la responsabilité d’Eternit dans la contamination des ouvriers d’Osasco, la plus grande usine d’amiante-
ciment d’Amérique latine, où les pathologies liées à l’amiante se chiffrent par centaines.
Il s’agit de la plus importante action civile collective jamais engagée par le ministère public (l’équivalent du «   parquet   » en France).
Le tribunal a donné raison aux réquisitoires des procureurs. Ils demandaient que l’employeur prenne en charge à vie le suivi médical et les soins des anciens travailleurs d’Eternit (examens et soins, suivi psychologique, médicaments...)
Ils réclamaient aussi des sommes importantes pour l’indemnisation du préjudice moral des victimes et des familles.
Tout cela n’aurait jamais existé sans l’action tenace de l’Abrea. Eliezer João de Souza, le président de l’association brésilienne, s’est félicité de ces avancées.
Le montant total des sommes à verser par Eternit pourrait se chiffrer à plusieurs centaines de millions d’euros.
Les cours de l’action Eternit ont chuté en bourse. Selon la presse économique, le montant des indemnisations pourrait dépasser la valeur sur le marché de la compagnie Eternit Brasil …

En attendant le Suprème Fédéral Tribunal

Une procédure initiée par des procureurs du Ministère du Travail est en cours auprès du Suprême Tribunal Fédéral (la plus haute instante de justice du Brésil). Elle demande de déclarer inconstitutionnelle la loi autorisant l’utilisation et l’extraction de l’amiante.

(Voir les articles sur le
Brésil dans les deux
derniers Bulletins de
l’Andeva)
 
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L’amiante au Brésil

Eternit est le principal actionnaire de la mine de Minaçu (état de Goias) dont sont extraits 300 000 tonnes d’amiante par an. Le Brésil reste un gros consommateur d’amiante et est devenu le second second exportateur mondial après la Russie (avec 140 000 tonnes par an). Il exporte un peu en Amérique latine (Colombie et Mexique) mais surtout vers les pays d’Asie. Brasilit, la filiale de Saint-Gobain a abandonné l’amiante depuis plus de 10 ans et produit du fibrociment sans amiante.
L’amiante est interdit au Brésil dans 5 états représentant 40% de la population du pays (São Paulo, Rio Grande do Sul, Rio de Janeiro, Pernambuco et Mato Grosso).


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°43 (septembre 2013)